Assainissement écologique (AE) et transition écologique : Convertir nos toilettes et nos eaux ménagères en une ressource utile !

LA SITUATION ACTUELLE : LES LIMITES RENCONTRÉES PAR L’ASSAINISSEMENT CONVENTIONNEL

Les toilettes à eau et l’assainissement conventionnel ont permis d’atteindre un confort quotidien et sanitaire indéniable. Cette approche qui fait référence d’un point de vue technique et culturel pose néanmoins les 3 problèmes suivants :

  • Le gaspillage, les toilettes à eau consomment 20% de notre eau potable qui est pourtant une ressource limitée et coûteuse. Malgré l’installation de chasses d’eau plus économiques et de quelques systèmes basés sur la récupération d’eau de pluie, cette pratique reste un non-sens environnemental et économique.
  • La pollution, l’approche conventionnelle génère une charge financière conséquente et un important volume d’eaux usées. Les stations d’épuration produisent des boues qui selon les cas sont compostées, incinérées ou enfouies et de l’eau résiduelle partiellement traitée (coliformes fécaux, nitrates…). L’eau est rejetée dans les cours d’eau et contribue à la dégradation de la qualité de l’eau et à l’eutrophisation des milieux naturels. Le changement climatique et le risque de manque d’eau dans les rivières accentuera cette situation.
  • La pression financière sur les ménages non raccordés à un réseau d’assainissement qui sous la pression des SPANC [Service Public d’Assainissement Non Collectif] sont incités à installer des équipements (micro-stations, filtre à sable…) coûteux (+/- 10 000 €). Concernant les micro-stations, leurs performances posent question1 et de nombreux litiges existent désormais entre usagers et prescripteurs…

À Paris, les activités nautiques des jeux Olympiques de 2024 nécessitent une bonne qualité des eaux de la Seine. Mais cela fait plus de 100 ans qu’elle est impropre à la baignade à cause de l’ensemble des rejets toujours en cours : stations d’épurations, eaux pluviales, trafic fluvial…

 

À savoir : Dans la plupart des cas, la station d’épuration d’une localité rejette ses eaux partiellement traitées dans un cours d’eau qui est utilisé par une autre localité située en aval pour s’approvisionner en eau potable !

L’ASSAINISSEMENT ÉCOLOGIQUE : UNE APPROCHE COHÉRENTE ET DURABLE

L’assainissement écologique repose sur les principes suivants :

  • Séparer à la source nos déjections : Urines, fèces et eaux ménagères ne se mélangent pas ce qui simplifie leur recyclage.
  • Valoriser cette ressource dans l’agriculture (assainissement productif) : Ce sont des éléments riches en fertilisants et en oligo-éléments qui, lorsqu’ils sont bien gérés, contribuent à la fertilité de nos sols.
  • Économiser l’eau : Les usagers de Toilettes à Compost (TAC) sont particulièrement économes, ils consomment 50% d’eau en moins que les autres2.
  • Simplifier le système d’assainissement : Limité aux eaux ménagères, le traitement demande peu de moyens et il utilise des matériaux renouvelables et il est accessible techniquement et financièrement à la majorité des ménages non raccordés à un réseau et équipés de TAC.

Le développement des TAC a été continu depuis plusieurs décennies dans les pays en zones arides et semi-arides où l’eau est rare, mais aussi dans les pays froids où l’accès à l’eau liquide est difficile une partie de l’année. En France, malgré l’aspect culturel qui les rend « transgressives et provocantes », elles sont en plein essor sur les sites isolés (montagne, parcours pédestre…), lors des événements (festivals) et auprès de certains ménages en milieu rural non raccordés au réseau d’assainissement.

 

Actuellement, de nombreux modèles de TAC et d’assainissement écologiques existent. Le secteur est très actif en matière de Réglementation et de Recherche et Développement pour permettre son déploiement.

L’écocentre Pierre et Terre

Depuis 15 ans, l’écocentre accompagne plus de 40 réalisations par an. L’approche proposée préférentiellement comprend des TAC ventilées reliées à un composteur et le traitement des eaux ménagères par un Filtre à Broyat de Bois (FBB) disposé dans une simple tranchée de terre. Le système est efficace, il offre un confort total et il est 3 fois plus économique qu’un assainissement conventionnel.

Le Parc National des Pyrénées (PNP)

Préserver la qualité de l’eau au sommet des bassins versants est essentiel. Cela passe par l’aménagement des refuges, des cabanes de bergers, des parkings… Aujourd’hui, les sites équipés d’assainissement conventionnel nécessitent des vidanges de fosses septiques par hélicoptère. Pour trouver une alternative plus cohérente, le PNP a sollicité l’écocentre. Depuis 8 ans, plus de 30 projets ont été accompagnés et des travaux ont été réalisés ou sont en cours sur 8 sites. L’écocentre a édité un Guide de l’AE en montagne qui présente un diagnostic élargi à l’ensemble du massif des Alpes et des Pyrénées.

Le Réseau de l’Assainissement Écologique (RAE)

Le RAE rassemble plus de 50 acteurs : associations environnementales, entreprises (bureaux d’études, loueurs de TAC, fabricants de TAC, installateurs d’AE…) institutions, chercheurs… Ils participent au développement du secteur, via des assises (INTESTINALE), des échanges d’expériences, des enquêtes.

Le secteur est très actif en matière de Réglementation et de Recherche et Développement pour permettre le déploiement des TAC et AE.

La valorisation de l’urine : un enjeu important qui peut être moteur pour dynamiser le secteur

L’urine est un produit riche3 et stérile. Plusieurs initiatives démontrent son intérêt agronomique via des publications4, des retours d’expériences et des stratégies de déploiement en France et à l’étranger comme aux USA5, en Suède ou en Afrique6. En France, OCAPI7 mène un programme de recherche & action sur les systèmes alimentation/excrétion urbains et la séparation à la source des eaux usées. Côté secteur privé, plusieurs fertilisants agricoles à base d’urine humaine sont déjà commercialisés : Le concentré AURIN (Suisse), le bio stimulant de Toopi Organics (Gironde), la poudre UriBoost d’ECOSEC (Hérault). Les diverses options d’utilisation (liquide simplement diluée, en concentré, en bio stimulant, en granulés…) permettent de s’adapter en fonction des lieux de collecte et d’utilisation et de maîtriser les aspects logistiques. ECOSEC a aussi, via son projet Valurine, permis l’élaboration de la cuvée « J’irai pisser sur vos vignes » du domaine viticole de la Jasse (34). A Paris, OCAPI a utilisé les urinoirs féminins nommés « Marcelle » de la designeuse Louise Raguet pour fertiliser les blés qui ont donné lieu à la fournée des pains « Boucle d’Or »…

Faire évoluer la réglementation pour autoriser les alternatives en faveur de la transition écologique

Le PANANC [Plateforme des Acteurs Nationaux de l’Assainissement Non Collectif] est un groupe de travail organisé par les Ministères de l’Ecologie et de la Santé. Il rassemble les entreprises, les institutions et les associations dont le RAE. Il contribue à l’évolution de la réglementation comme celle définie pour l’utilisation des TAC dans les habitations de moins de 20 équivalents habitants. Aujourd’hui, le travail porte, entre autres, sur le traitement des eaux ménagères (eaux usées sans les eaux vannes) par le FFB. Un arrêté d’expérimentation est en cours d’élaboration. Il doit permettre de réaliser les FBB en collaboration avec les SPANC. Plusieurs études, achevées ou en cours par l’INRAE de Lyon, contribuent à définir les caractéristiques des FBB telles que « la porosité des sols » et « L’efficacité potentielle du broyat de bois ».

L’Assainissement Écologique : Des techniques durables à l’intention du plus grand nombre

À l’heure de la transition écologique, réduire ses déchets par la séparation à la source puis les convertir en ressources sont des objectifs formidables. Cela préserve l’environnement et permet à tous les ménages qui le souhaitent de gagner en cohérence. La dynamique actuelle va en ce sens en France comme à l’international. Elle permettra de proposer un nouveau modèle mieux adapté aux conditions de demain et applicable partout à travers le monde..

Aujourd’hui plus de 2 milliards d’humains n’ont pas de toilettes et très peu des eaux usées sont recyclées…

 

Références :

  1. INRAE, Etude suivi in situ IRSTEA 2017
  2. Enquête RAE, Consommation d’eau des ménages utilisant des toilettes sèches / à compost, Mai 2020
  3. Un litre d’urine contient environ 6 g d’azote, 1 g de phosphore et 2 g de potassium
  4. L’urine de l’or liquide au Jardin / Renaud De Looze – Terran ; Guidelines on the use of urine and faeces in crop production / EcoSanRes Stockolm Environement Institute
  5. Rich Earth Institute / USA
  6. Ouagadougou, Birg Koom engrais liquide
  7. OCAPI : Programme de recherche & action sur les systèmes alimentation/excrétion urbains et la séparation à la source des eaux usées / Associée au Laboratoire Eau Environnement Systèmes Urbains et à l’Ecole des Ponts Paris Tech
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